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Les chemins du communisme libertaire en Espagne 1868-1937
Présentation • Bordeaux • mardi 20 juin 2017 • 20 h • Librairie du Muguet

Présentation du livre
« Les chemins du communisme libertaire en Espagne 1868-1937 »
à Bordeaux le mardi 20 juin 2017
à 20 heures à la Librairie du Muguet [1]

Communards de Montmartre

Ce sont les discussions qui occupaient les réfugiés et compagnons de route de la Commune dans le massif du Jura dans les années 1870 qui amenèrent à la théorisation de ce qu’on appela le « communisme anarchiste » – discussions qui portaient sur les communautés décentralisées, sur la manière de les faire naître et prospérer, et de les « fédérer » par des liens de solidarité.
Kristin Ross, L’imaginaire de la Commune, La Fabrique, 2015. (p. 10)

Sans doute l’Espagne sera-t-elle le théâtre de la prochaine révolution en Europe. […] Vu qu’en aucun autre pays d’Europe n’existe un mouvement communiste libertaire de l’importance de celle du mouvement espagnol, [ce dernier] porte toute la responsabilité de l’histoire future du continent. […] C’est dans l’anarchisme espagnol que bat le cœur même de l’Espagne. In « Lettres d’Allemagne et considérations sur le communisme libertaire »
(Article publié dans La Revista Blanca en mai 1933).

Un compagnonnage rapproché, douze ans durant, avec les anarchistes et anarcho-syndicalistes de l’Espagne des années trente nous a, de fait, confrontés au même constat : le mouvement communiste libertaire a focalisé en lui un immense espoir de révolution sociale auprès d’une partie du mouvement ouvrier de son temps. Et c’est bien en Espagne que démarra à cette date – à des degrés divers et en certains endroits seulement – l’unique mise en pratique connue du principal objectif révolutionnaire avancé par les courants marxistes et libertaires aux XIXe et XXe siècles : l’abolition du travail salarié. Une partie de l’Aragon fournit le cadre d’une « vie collective possible, sans dieu ni maître, donc avec les hommes tels qu’ils sont [2]… ».

La genèse que nous entreprenons du processus qui a mené à l’expérimentation du projet communiste libertaire nous fait remonter aux années 1868-1872, celles où les idées et pratiques anarchistes en cours d’élaboration dans le creuset de l’AIT, puis de l’Internationale anti-autoritaire, se combinèrent magistralement avec le fond anti-étatiste, anticlérical et anticapitaliste d’une partie des classes populaires espagnoles.

Grâce à Max Nettlau, auteur d’un magistral ouvrage sur la Première Internationale en Espagne, on apprend que cette rencontre commença très fort. Dès 1872 l’AIT anti-autoritaire recommanda sa section espagnole, la FRE, « comme la meilleure jusqu’à ce jour » ; c’était aussi celle qui avait le plus grand nombre d’affiliés dans ses organisations de type pré-syndical (Sections de métiers et Sociétés de résistance), et qui allait durer le plus longtemps. À partir de là, notamment en Catalogne, en Andalousie et dans le Levant, se cherchèrent, se trouvèrent et parfois se complétèrent des façons de résister au processus capitaliste de réduction des hommes à leur force de travail. Elles furent à l’œuvre non seulement dans l’atelier, l’usine et les communes rurales, mais aussi dans les quartiers populaires, notamment à partir de pratiques associationnistes ancrées dans les principes de respect de l’individu, de liberté, de solidarité, d’auto-éducation, de rapport à la nature et à la culture, dans des espaces (écoles rationalistes, ateneos etc.) qui se tenaient à l’écart des institutions bourgeoises et religieuses.

Tant sous la monarchie que sous la république, la répression sauvage exercée par les classes possédantes à l’encontre des anarchistes les contraignit bien souvent à l’activité clandestine. Toutefois, « actifs avec la loi ou malgré elle » (Clara E. Lida), ils surent développer des mécanismes de survie en s’organisant en petits groupes – en partie autonomes, mais toujours en liaison avec la FRE – et en développant un art consommé de la diffusion de leur propagande et de leur presse écrites, lues à haute voix entre compañeros.

Et c’est à ce moment (1885-1890) et dans le quartier de Gracià (Barcelone) que des hommes et de femmes aux pratiques internationalistes posèrent les jalons des groupes d’affinité anarchistes d’Espagne, les premiers à se revendiquer partisans du communisme anarchiste. Ils échangeaient énormément avec les anarchistes français, notamment avec l’équipe du Forçat du Travail de Bordeaux.

Forçat du Travail

Grâce à Fran Fernández Gómez, un jeune historien barcelonais, nous avons désormais accès au riche matériel de sa thèse Anarcocomunismo en España (1882-1896), où il suit pas à pas ces propagandistes soutenus par l’équipe du journal Le Révolté de Genève. Par ce travail Fran veut contribuer à battre en brèche certaines publications historiennes selon lesquelles « entre 1888 et 1910 l’anarchisme fut un mouvement presque sans aucune incidence sociale au-delà de son action terroriste ».
[Extrait de Les chemins du communisme libertaire en Espagne 1868-1937. Premier Volume : Et l’anarchisme devint espagnol : 1868-1910 [3] ]

Les Giménologues, 10 juin 2017