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Les Giménologues • Angers • 7 novembre 2017
Librairie Les Nuits Bleues • 20 h

Les Giménologues à Angers le 7 novembre 2017

La librairie Les Nuits Bleues organise une conférence mardi 7 novembre à 20h :

Espagne 1936 : les milices anarchistes et les volontaires internationaux

L’Espagne Antifasciste, n° 4, du 30 août 1936, petite annonce :

Notre boîte aux lettres :

Les camarades Carpentier et Ridel, colonne Durruti, Groupe International Antifasciste, à Pina de Ebro, prient les camarades français, belges, italiens et bulgares venus de France pour combattre, de leur écrire, en vue du renforcement de ce groupe.

Charles Ridel :

Bujaraloz, 2 août [1936]
Nous sommes arrivés à Bujaraloz où siège le Comité militaire de la colonne Durruti. Le commandant officiel, Pérez, est installé à Lérida, une centaine de kilomètres en arrière du front ! […]
Les miliciens sont pareils à ceux de Pancho Villa que le cinéma a popularisés. Pas un n’a le même uniforme : des combinaisons bleues, des habits civils, des uniformes dépareillés, des casques, des bérets, de grands chapeaux mexicains, des bonnets de police rouges et noirs, etc. La seule partie qui soit commune, ce sont les espadrilles. On rencontre des Italiens, des Français, des Allemands. Paysans et ouvriers se mêlent, et parmi eux des carabiniers, des gardes civils, qui obéissent tous aux comités de la FAI et de la CNT. […]
Samedi 8 août
[…] Dans presque toutes les centuries, des Italiens, des Français, des Allemands, voire des Belges et des Bulgares se retrouvent. […] Le tout s’amalgame aisément et forme un ensemble solide, malgré certaines difficultés de langage.
Un noyau d’Italiens et de Français s’est constitué avec comme délégué un ancien officier de la Coloniale [Louis Berthomieu], dont l’absence de doctrine bien précise est suppléée par une intelligence très vive et sans préjugés. Ce sont tous des gars de Paris, de Toulon ou de Grenoble. […] Proscrits d’Italie et exploités de l’impérialisme français sont venus faire le coup de feu pour le vieux rêve, caressé depuis tant d’années, d’une société libertaire. Le groupe va se grossir peu à peu d’éléments nouveaux. Face à la Légion marocaine, ce ramassis de tueurs et de voleurs, venus en Espagne pour restaurer l’ordre bourgeois, se dresse la Légion internationale des sans-patrie, qui sont venus se battre dans la péninsule pour l’ordre ouvrier et révolutionnaire.

Antoine Gimenez :

En 1936, j’étais ce qu’il est convenu d’appeler aujourd’hui un marginal : quelqu’un qui vit en marge de la société et du code pénal. Je croyais être un anarchiste. Je n’étais en réalité qu’un révolté. (…) C’est à Pina de Ebro, en voyant s’organiser la collectivité, en écoutant les conférences données par certains copains, en me mêlant aux discussions de mes amis, que ma conscience, en sommeil depuis mon départ d’Italie, se réveilla.

Charles Carpentier :

Avant, on attaquait les tramways à Saint-Denis, on se battait contre les flics et on finissait la nuit bouclés au fort de l’Est… C’étaient des enfantillages. Maintenant, un peuple combattait pour sa liberté. Il fallait y aller !

Georges Navel :

Dans la région, les journées de travail, quand j’en trouvais, étaient de dix heures pour des payes réduites à la moitié de ce qu’elles avaient été quelques années plus tôt. J’avais décidé de ne pas me soumettre à de pareilles conditions. […] je ferai pousser du légume, mais je ne travaillerai plus pour des patrons [1] .
Pour moi, il ne s’agissait pas d’un « voyage », mais d’aller là-bas pour prendre part aux combats sur les barricades, s’ils n’étaient pas déjà terminés, ou de me rendre utile en travaillant de mon métier. J’avais marché en direction du garde-frontière. À mes premières paroles « soy francés », sa réplique « Es igual somos todos hombres » m’avait vraiment plu.

Simone Weil :

Je n’aime pas la guerre ; mais ce qui m’a toujours fait le plus horreur dans la guerre, c’est la situation de ceux qui se trouvent à l’arrière. Quand j’ai compris que, malgré mes efforts, je ne pouvais m’empêcher de participer moralement à cette guerre, c’est-à-dire de souhaiter tous les jours, toutes les heures, la victoire des uns, la défaite des autres, je me suis dit que Paris était pour moi l’arrière, et j’ai pris le train pour Barcelone dans l’intention de m’engager.

Mimosa (Georgette Kokoczinski) :

Le sort en est jeté, je vais au front moi aussi, je l’ai demandé expressément. Je crois que je ne reviendrai pas, mais cela est sans importance, ma vie a toujours été amère et le bonheur n’existe pas. […] Je veux partir, aller là où l’on oublie peut-être tout, là où je serai l’activité qui sauve, où l’on m’aimera peut-être un peu.

Antoine Gimenez :

Notre groupe [ International] fut bientôt le seul à Pina à comporter des membres du sexe féminin. Six femmes s’occupaient de l’infirmerie et de la cuisine : Marthe, Madeleine, Simone, Augusta, Mimosa et Rosaria [Rosaria = Pepita Ingles morte en avril 37 à Santa Quiteria]. Deux d’entre elles, Marthe et Madeleine, vivaient en ménage, respectivement avec Pierre et Hans. À l’exception de Simone Weil qui rentra en France, toutes les autres restèrent en Espagne pour toujours. Marthe [sans doute Juliette Baudart] Mimosa et Augusta tombèrent à Perdiguera.

Edi Gmür :

16 janvier. [1937] Le soir, j’ai été invité par les gens qui vivent en face de nos quartiers, Casa Carmen. Je me suis bien amusé. Trois Espagnols ont joué de la mandoline et du luth. Ils ont chanté de magnifiques chants populaires aragonais, et la mère de famille a dansé une jota avec une souplesse étonnante. Personne ne pensait plus à la guerre. J’ai fait la connaissance d’Henrique [sic], un garçon gai et très intelligent. On m’a demandé mon nom, d’où je venais. Quand j’ai dit que j’étais suizo, un vieux campesino, qui ne sait probablement ni lire ni écrire, s’est exclamé tout heureux : « Mais c’est le pays d’Henrique [sic] Pestalozzi, l’ami de Francisco Ferrer ! » Ça m’a drôlement étonné. […] La petite Carmen de la maison est par ailleurs bien jolie.

Les Giménologues, 24 octobre 2017

« Après le coup d’État militaire des 17 et 18 juillet 1936 contre le gouvernement républicain, les milices anarcho-syndicalistes et anarchistes de la Confédération nationale du travail et de la Fédération anarchiste ibérique jouent un rôle déterminant dans la défense de la République durant les premiers mois de la guerre civile. Elles prennent également une part active à la Révolution sociale espagnole de 1936. Dans ces milices, les volontaires refusent l’uniforme, le salut militaire et autres marques de respect à la hiérarchie. Les officiers, élus, pouvaient se succéder rapidement à la tête d’un groupe et les hommes s’estiment en droit de discuter les ordres et de ne les appliquer que s’ils sont d’accord. Des volontaires internationaux vont rejoindre les milices anarchistes : c’est leur histoire qui sera abordée par les Giménologues lors de cette conférence. »

Les Nuits Bleues