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Les Gimenologues
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Dimanche 28 mai 2006. Sud-Ouest.

" Livre ouvert". Note de lecture par Gérard Guégan.

Noir c’est noir.

"Les Fils de la nuit" est un livre remarquable par tant de côtés qu’on ne sait trop comment en rendre compte. Doit-on dire que nous tenons là le plus précieux des témoignages sur ce qui fut le guerre civile d’Espagne et qui aurait pu être le première révolution vraiment prolétarienne ?
Ou souligner que, sans le secours décisif de quelques libertaires , ce témoignage, pour singulier qu’il soit, aurait perdu à ne pas être assorti d’un appareil de notes, proprement extraordinaire, qui le rend si éclairant ?

Commençons donc par l’auteur, Antoine Gimenez, qui naquit Bruno Salvadori, Italien de 26 ans et anarchiste conséquent, rejoignit dès juillet 1936 la mythique colonne Durruti, et ne rendit les armes qu’à la victoire de Franco. Jamais il ne changea d’opinion si bien qu’en 1974, retiré à Marseille, il enreprit sur l’insistance de sa petite-fille le récit de ses exploits du temps où la critique par les armes faisait entendre sa voix. C’est ce manuscrit refusé par les éditeurs en 1982, qu’une bande de copains, se baptisant "Giménologues", déterrèrent. Et, ne rechignant pas à la tâche, décidèrent d’éclairer par toute une série d’indispensables précisions. Sauf que, comme eux-mêmes en conviennent, n’importe qui, pour peu qu’il ait l’âme sensible, peut lire ces "Fils de le nuit" sans consulter les notes.

Un homme qui se raconte, et qui brusquement tutoie la grande histoire, sait toujours trouver l’oreille de son lecteur. Je dirai même que, dans le cas de Gimenez, son style, rudimentaire mais chaleureux, fait mieux que bien des romans écrits à l’huile de coude. Sans doute parce-qu’il incarne dans sa chair chacune des phrases qu’il arrache à sa mémoire.
Dans ce registre, je ne connaissais jusqu’ici que le bouversant "Ma guerre d’Espagne à moi", de Mika Etchebéhère. Elle était trotskiste, Gimenez était anar. Ils ont tous deux perdu. Mais que valent aujourd’hui les gagnants, qu’ils s’appellent Franco ou Staline ? Lisez "Les Fils de la nuit".

Sud-Ouest. 28.05.06.
M. Etchebéhère. "Ma guerre d’Espagne à moi".