En librairie le 23 mai 2019
Ouvrage disponible un peu avant lors de la tournée de présentations à Paris et en Bretagne (cf. Article 833)
[L]a révolution sociale qui s’accomplit alors ne provint pas d’une décision des organismes de direction de la C.N.T., ou des mots d’ordre lancés par les militants et agitateurs qui tenaient publiquement les premiers rôles, et furent presque toujours inférieurs à leur tâche historique. Elle se produisit spontanément, naturellement, non pas (évitons la démagogie) parce que « le peuple » dans son ensemble était devenu tout à coup capable de faire des miracles, grâce à une science révolutionnaire infuse qui l’aurait brusquement inspiré, mais parce que, répétons-le, au sein de ce peuple, et en faisant partie, il y avait une minorité nombreuse, active, puissante, guidée par un idéal, qui continuait à travers l’histoire une lutte commencée au temps de Bakounine et de la Première Internationale ; parce que dans d’innombrables endroits il se trouvait des hommes, des combattants qui, depuis des décennies, poursuivaient des buts constructifs concrets, doués qu’ils étaient de l’initiative créatrice et du sens pratique indispensables aux adaptations locales, et dont l’esprit d’innovation constituait un levain puissant, capable d’apporter des orientations décisives aux moments nécessaires.
La situation était donc révolutionnaire tant par la volonté des hommes que par la force des choses. (Gaston Leval, Espagne libertaire 36-39, 1983, p. 77).
Le 20 juillet 1936 le coup d’État échoue dans une partie de l’Espagne du fait de la résistance des hommes d’action de la CNT-FAI et d’une partie de la population ouvrière, qui s’adonne aussitôt à la dépossession des possédants. En Catalogne l’État est à terre, les plus grands patrons et propriétaires ont fui. Le mouvement ouvrier le plus radical et le mieux armé du camp républicain se retrouve maître de la situation. Pour autant, les leaders de la CNT-FAI n’appellent pas à la mise en route du communisme libertaire. Ils vont « collectiviser » le secteur productif sous l’égide de l’État non aboli, maintenir le salariat et inciter la classe ouvrière à s’adapter à l’organisation scientifique du travail.
Simultanément, une partie de la militancia et de la base du mouvement s’engage dans une sortie plus radicale du capitalisme, notamment en Aragon, et met en application les fondamentaux du projet communiste libertaire conçu au sein de l’AIT anti-autoritaire.
Nous reprenons pour ce dernier volume le titre de l’ouvrage de Vernon Richards, rédigé en 1953, ainsi que son questionnement : « Jusqu’à quel point le mouvement révolutionnaire fut-il responsable de sa propre défaite ? »
Table des Matières
Prologue
Chapitre I Un processus révolutionnaire contrarié après le 19 juillet 1936
Le « circonstancialisme » des leaders de la CNT-FAI
La création du CCMA et le plenum de la CNT du 21 juillet
« Aujourd’hui il n’y a d’autre problème pour le prolétariat, ni d’autre ennemi pour le peuple que le fascisme soulevé »
Dans les quartiers de Barcelone et les campagnes aragonaises : Delenda capitalo
Une amorce de socialisation sans consigne confédérale
La normalisation à l’oeuvre
La mise en place de l’anarchisme d’État.
Chapitre II Les entreprises barcelonaises : du « contrôle ouvrier » au contrôle des ouvriers
Les étapes de la « légalisation de la révolution »
Un contrôle ouvrier vite entravé
Comment le terme de « collectivisation » supplanta celui de socialisation
Les différents types d’entreprises
« Ni collectivisation, ni nationalisation, socialisation ! »
Tension entre les comités supérieurs et la base militante : « Nous considérons les quartiers comme nos pires ennemis ! »
Gestion syndicaliste des entreprises et résistance ouvrière
Maintien du salariat et appels au sacrifice
Intensification du travail industriel
Le contrôle du travail et des ouvriers
« Nous ne croyons pas à une résistance massive au travail »
« Toute cette révolution contre l’économie doit s’arrêter »
Échec de « la construction d’une utopie sur le lieu de travail »
Chapitre III Le communisme libertaire in vivo : du municipe libre à la fédération des collectivités
Un aperçu sur les collectivités agraires en Catalogne
L’Aragon : la seule région sans État d’Espagne
Quelques chiffres
Municipes, comités et collectivités
L’abolition du salariat et les conditions de travail
L’abolition de la propriété privée en question
La Fédération régionale des collectivités d’Aragon
Enrique Lister, le bras armé de la contre-révolution
La création de la Fédération nationale paysanne
Chapitre IV La « bolchévisation au sein de la CNT »
La critique de la politique collaborationniste
Mai-septembre 1937 : l’offensive contre la base de la CNT
Mai 37
Le retour à la clandestinité des comités de défense
La presse libertaire
La mutation de la Confédération
« Le communisme libertaire n’était qu’une utopie »
Le plenum tripartite du mouvement libertaire des 15-17 septembre 1937
Le plenum économique élargi de la CNT des 15-23 janvier 1938
Le pacte UGT-CNT de mars 1938
L’abandon des barriadas
Chapitre V (Nouveaux) Enseignements de la révolution espagnole
Annexes
Annexe I : L’OST, le « compromis fordiste » et la réaction ouvrière (absentéisme, sabotage, indiscipline)
Annexe II : La collectivisation de l’entreprise métallurgique Rivière
Annexe III : « Si fuese el trabajo tan bueno, se le hubieran guardado los ricos para si mismo »
Annexe IV : La campagne d’éloge du travail en Espagne 1936-1938
Annexe V : Le travail
Bibliographie
Index
Déjà paru aux Éditions Divergences :
• Les chemins du communisme libertaire en Espagne 1868-1937. Et l’anarchisme devient espagnol 1868-1910, 2017
• Les chemins du communisme libertaire en Espagne, 1868-1937 L’anarcho-syndicalisme travaillé par ses prétentions anticapitalistes, 1910-juillet 1936, 2018.
Les Giménologues, 30 avril 2019