de Miguel Amorós,
Ed. Virus 2011
« L’anarchisme andalou est parmi les grands oubliés de l’histoire de la première moitié du XX° siècle et notamment celle qui concerne la dictature de Primo de Rivera, la République, la guerre civile et la révolution. Ces deux décades d’une sanglante guerre de classe dont sortiront vainqueurs les secteurs les plus réactionnaires, et le fascisme, firent de l’anarchosyndicaliste grenadin Francisco Maroto del Ojo le symbole d’une génération de militants et de combattants.
Maroto, avait deux frères et devint très jeune orphelin de père. Il naquit dans le quartier d’Albaicín où vivait une bonne partie des ouvriers grenadins expulsés du centre après de multiples modifications urbaines. Ébéniste de profession, il deviendra un des principaux leaders de la CNT sous la République. Maroto sera autant aimé par les classes populaires de Grenade qu’il sera haï par la bourgeoisie et les caciques qui représentaient la droite la plus conservatrice et ultramontaine. Qualifié de malfaiteur et de délinquant dans les pages du journal monarchiste El Ideal, Francisco Maroto participa activement à la chaude combativité ouvrière de Grenade dans les années trente, en subissant les conséquences répressives.
Mais ce sera au cours de la guerre que Maroto deviendra un personnage de premier plan, ainsi que le malagueño Juan Santana Calero et le sevillan Juan Arcas. Malgré la constitution d’une colonne de miliciens, la chute de Málaga fut utilisée pour criminaliser les miliciens anarchistes et pour emprisonner et neutraliser Maroto lui-même. Malgré l’absence de preuves et les multiples demandes de libération, l’animosité du PCE comme du gouverneur civil d’Almería ainsi que celle du socialiste Gabriel Morón – jointe à la passivité calculée des dirigeants de la CNT, plus préoccupés par les rapports de force gouvernementaux que des prisonniers du mouvement – firent qu’il passa une bonne partie de la guerre en prison.
Capturé par les fascistes à Alicante en janvier 1940, il sera fusillé en juillet après avoir été sauvagement torturé. L’histoire de Maroto ne peut se lire comme celle d’un seul homme mais comme la biographie de l’anarchisme andalou où des centaines de militants se forgèrent le caractère dans les luttes sociales. Une histoire qui a été rigoureusement verrouillée tant par le franquisme que par le régime qui a suivi. Ce livre rompt un peu avec le mythe d’un anarchisme andalou rural et millénariste. L’auteur donne à voir un anarchisme qui agit dans les villes avec une grande combativité.